[Review] Superman Son of Kal-El (tome 3)

Je reviens dans le monde du Superman rajeuni Jon Kent pour le dernier tome. Si le tome deuxm’avait déçu, j’avais tout de même très envie de lire la conclusion d’une série au personnage attachant.

Un résumé pour la route

Face à l’injustice est écrit par Tom Taylor (NightwingX-Men Red) avec l’aide de Nicole Mainespour le premier épisode. Les dessins sont de Clayton Henry (Archer & ArmstrongSavage) pour les chapitres un, quatre à six et sept à neuf, Cian Tormey (InjusticeLazarus Planet) pour le deuxième et troisième, Darick Robertson (BallisticTransmetropolitan) pour le septième. Ce troisième et dernier volume regroupe les épisodes 13 à 15 de Superman Son of Kal-El puis les épisodes un à six de Adventures of Superman: Jon Kent publiés aux États-Unis chez DC Comicsentre juillet 2022 et août 2023, puis en France chez Urban Comics le 12 janvier 2024.

Dans sa lutte contre Henry Bendix, Jon Kent a rencontré un allié (et un amoureux), Jay Nakamura. Voulant protéger ce dernier dont l’identité secrète a été dévoilée, il l’invite dans la Forteresse de Solitude. Mais une femme mystérieuse, Dreamer, les y attend pour leur révéler une terrible vision…

On en dit quoi sur Comics have the power ?

Superman Son of Kal-El continue sur la lancée en décrivant un ado assumant des responsabilités plus grandes que celles de son âge. Depuis le premier épisode, Jon Kent a légèrement évolué. Il a un amoureux, un lycéen Jay Nakamura qui, en secret dirige la Vérité, chaîne d’information par internet. Depuis que les médias connaissent l’identité de Jay, Jon pense d’abord à le protéger avant de mener sa lutte contre Bendix. Son pouvoir est en mutation en lien avec la puberté. Il a un afflux nouveau de pouvoir qu’il ne sait gérer et se retrouve confronté à ses limites quand une pluie de satellites tombe sur terre. Par sa claustrophobie, je découvre que Jon, demeure traumatisé par son emprisonnement dans une autre dimension. Symboliquement, il termine son run en luttant contre son père.

La deuxième partie du livre reprend d’ailleurs le thème du passage de relai mis en place dans le premier tome. En perdant sa cape, Jon s’émancipe du costume familial. Appelé par une Lois et un Superman de terres parallèles, il traverse d’autres dimensions pour sauver des Superman attaqués par Ultraman, un Clark Kent dévoyé de Terre-3. Il prend donc la suite de son père pour symboliquement le sauver. Depuis le premier tomeSuperman Son of Kal-El est une affaire de famille. Sa mère Lois a rejoint la Vérité. Dans le tome précédent, son amoureux Jay Nakamura a révélé à Jon qu’il peut traverser les murs. Il a également perdu son anonymat en allant le défendre. Cependant, il refuse d’être un prince que l’on garde protégé dans un château mais veut agir. Ce personnage est également en rapport à la famille puis qu’il est le fils de l’ancienne présidente de Gamorra avant que l’archipel ne devienne une dictature dirigée par Henry Bendix. Sa mère étant emprisonnée par Bendix, sans qu’il le sache, libérer son pays est un moyen de la sauver. Hélas, ce personnage demeure trop proche de Lois. Jon a pour compagnon un journaliste engagé comme son père. Freud serait intéressé par ce cas. Cette intrigue donne néanmoins une scène touchante quand Lois et Jay discutent sur le stress d’attendre quand Superman agit. Jon est confronté au réel et à trois dictateurs (Bendix, Ultraman et le monde d’Injustice). Comment faire tomber une dictateur ? Avec quel degré de violence et quelle compromission ? Jon comprend à la fin qu’il n’est pas plus difficile d’agir mais plus facile. Il a le pouvoir de tout faire mais l’obligation de se restreindre pour ne pas supprimer la liberté des autres.

Dans ce voyage interdimensionnel, Taylor réfléchit à ce qui fait la singularité de Superman. Dans de nombreux mondes, Superman est l’ultime protecteur de la terre mais il existe deux doubles négatifs : Ultraman qui rit quand Jon implore de laisser rentrer chez lui. Le dictateur d’Injustice est un père toxique qui surprotège ses parents et le fils qu’il n’a pu avoir. On pourrait croire que la rencontre avec un Superman noir tournerait au combat, mais, ce moment devient métatextuel. Jon déteste quand les héros se tapent dessus lors de leur première rencontre et donc refuse de frapper sans discuter. Ce passage est également un moyen de montrer la constance bienveillance de Jon. Hélas cette qualité devient également un défaut car Jon manque d’aspérité. Pourtant, on pourrait dire que Dick Grayson est aussi lisse en comparaison du sombre Batman. Alors, pourquoi Superman Son of Kal-El n’arrive-t-il pas au niveau de Nightwing ? Je pense que le dessin y est pour beaucoup. Redondo est excellent et pousse ses remplaçants à se surpasser alors que les pages de Clayton Henry et Cian Tormey ne me restent pas en mémoire mis à part le magnifique super-héros noir. La colorisation très uniforme transmet peu d’émotion. On peut voir la différence avec le très bel épisode de Darick Robertson.

D’un côté, Taylor reste donc constant dans ses thèmes de la famille et du passage de génération. Hélas, d’un autre côté, le scénariste évacue trop vite ces idées pour s’amuser avec l’univers connecté. La série étant récente et ayant besoin de reconnaissance, elle est très ancrée dans la continuité. Le run de Bendis est prolongé. Jon évoque les souffrances psychologique pendant son emprisonnement dans une autre dimension. Avec son nouveau pouvoir, sa peau et son costume deviennent bleu comme son père dans les années 90. Le personnage Dreamer fait un lien avec la Légion des super-héros où Jon est passé. Ce Superman est rarement seul mais on croise Robin, Batgirl, Nightwing, Mister Terrific… Des liens sont faits aux Renégats et avec Earth 2 ou DCeased par le multivers. Il prolonge même ces série en montrant que trois Rénégats métamorphosés par Bendix veulent se venger.  Taylor réécrit Injustice en y incluant Jon. Cet homme lumineux débarque dans un des lieux les plus sombres de DC. Toutes ces séries ont vu passer le même scénariste si bien que j’ai la sensation que Taylor fait un bilan d’étape de sa carrière. Il réécrit également le monde qui a fait sa gloire en apportant de la lumière quand avant il jouait à tout casser et repeindre en noir. 

En effet, les pouvoirs et les personnages sont souvent en lien avec l’idéalisme et une vision progressiste du monde. La scène finale du combat à Gamorra est également l’acceptation publique d’une relation amoureuse. Dans le monde d’Injustice, Superman a réglé tous les problèmes actuels (le réchauffement climatique et les guerres) mais, derrière cette façade, Superman et la Ligue sont des dictateurs. Jon s’en rend compte mais ne rejoint pas pour autant les résistants car chaque camp abuse de son pouvoir. La Rêveuse voyage dans les rêves et a des visions prémonitoires qu’elles utilisent à plusieurs pour empêcher une défaite des héros. Une discussion se pose la question de la meilleure façon d’installer la démocratie. Jon veut agir l’extérieur en attaquant Gamorra pour faire s’effondrer la dictature, mais Jay préfère utiliser les médias pour faire connaître et ensuite agir de l’intérieur. Tout le monde se rallie à cette idée, mais étrangement le scénario n’aborde plus le sujet et la méthode de Jon est appliquée sans débat. Symboliquement, le pouvoir de Jay permet d’aller dans des endroits inaccessibles tout comme il utilise internet pour révéler la vérité. La série a un regard nuancé sur internet. Les identités secrètes de Superman et de Jay ont été volées quand des passants ont posté des photos sur les réseaux. Les satellites de Lord industries qui, piratés par Bendix, tombent sur terre, rappelent Starlink d’Elon Musk. Bendix utilise un satellite pour espionner et agir à distance, mais il lui sert également à isoler son pays. Hélas, Bendix est battu trop facilement. J’ai l’impression d’assister à un retour de l’idéalisme chez DC avec cette série ainsi que NightwingFlash et World’s Finest.

Alors, convaincus ?

Arrivé à ce dernier tome plus réussi que le précédent, je reste partagé sur cette série. Le scénario est malin et le voyage entre les dimension propose une intégration intéressante dans l’ensemble des séries écrites par Tom Taylor. Hélas, le dessin reste fade et le scénario manque de moments forts.

Laisser un commentaire