[Interview] Giuseppe Cafaro, une plume métallique

À l’occasion de la dernière édition du salon Paris Manga, le libraire Diable Blanc Comics a fait venir Giuseppe Cafaro, un dessinateur dont je n’avais, à l’époque, lu aucune œuvre mais que j’ai découvert au fil de cet entretien.

Comment s’est passé votre enfance ?

Je suis né près de Naples à Capoue dans le Sud de l’Italie. Autant que je m’en souvienne, j’ai toujours dessiné. Comme de nombreuses personnes de ma génération, j’ai commencé par les mangas et les animés comme Dragon Ball ou Saint SeiyaAkira Toriyama est peut-être à l’origine de tout : l’oncle d’un de mes meilleurs amis avait l’Encyclopédie Dragon Ball, un très gros livre d’illustrations et de concept arts de Toriyama. J’ai pris l’habitude de dessiner chaque page. Le matin où j’ai appris sa mort, j’ai pleuré comme si j’avais perdu un ami. Sans son art, je ne serais pas ici. Je continue à lire davantage de mangas que de comics et à utiliser ces deux influences pour créer mon propre style. À l’âge de 19 ans, j’ai décidé d’aller dans une école de bd grâce à Image Comics car j’avais été impressionné par l’art de Michael Turner et de Marc Silvestri.

Pourquoi ce choix plutôt que les beaux-arts ?

J’ai fait les deux. J’ai été diplômé de l’académie des beaux-arts de Naples. Je pense qu’il faut d’abord avoir une vision large de l’art pour ensuite se spécialiser dans un domaine. Ainsi, je peux utiliser des images classiques d’artistes très anciens comme référence pour une couverture. En démarrant aux beaux-arts, je ne savais pas qu’il existait une école privée de bd dans la même ville. J’ai donc décidé de suivre les deux cursus en parallèle. Je travaillais dans une pizzeria le week-end pour financer les frais de scolarité et de transport. Fabrizio Fiorentino et Lorenzo Ruggiero ont été mes professeurs pendant trois ans. J’ai beaucoup appris d’eux en particulier l’amour du travail. J’ai eu la chance de les voir travailler sur leurs planches car, très souvent, ils dessinaient pendant qu’on étudiait. Ce sont des personnes magnifiques. On se rencontrent très souvent et ils me prodiguent des conseils sur mes œuvres bien que je sois professionnel depuis onze ans. La dernière année, le président de GG Studio était également un de mes professeurs. J’allais presque chaque jour dans son studio pour dessiner et étudier car je suis le seul dessinateur dans la petite ville où je vis. De fil en aiguille, j’ai fait plusieurs projets pour eux pendant trois ans mais la plupart n’a pas été publié car le studio a fait faillite. J’ai ensuite réalisé des couvertures pour le marché américain quand Zenescope m’a repéré sur Facebook.

Vous réalisez ensuite votre rêve : dessiner une série de Michael Turner.

Oui c’était un de mes objectifs, mais être choisi par la maison Aspen a été une énorme surprise. J’ai commencé par une couverture pour la San Diego Comi-Con en 2013, puis plusieurs livres pendant sept ans. Dans Fathom, on a créé au personnage de Kiani une armure couvrant une grande partie de son corps car on voulait que les lecteurs la voient comme un personnage et pas simplement un corps. A mes débuts, en particulier pour Zenescope, j’ai dessiné de nombreuses femmes dans des attitudes sexy, mais depuis j’ai arrêté et j’ai changé ma manière de les représenter car je ne voulais pas être cantonné aux pin-ups. Je n’aime pas quand on me demande des personnages de DC avec des seins énormes. Heureusement, la plus grande partie de mes œuvres ne repose pas sur la sexualisation des femmes.

Vous êtes ensuite arrivé sur les Power Rangers.

Plus tard en fait. J’ai fait trois albums entre 2018 et 2020. Adorant les Power Rangers depuis l’enfance, il m’a été facile de me fondre dans cet univers. J’ai fait ensuite plusieurs projets comme deux special de Vampirella, un run de douze numéros de Red Sonja et quelques épisodes de Loaded Bible – Blood of my Blood avec Tim Seeley et Jim Orlando. J’ai ensuite dessiné les six numéros de The Mighty Barbarians pour un excellent petit éditeur Ablaze Publishing. Depuis août dernier, je travaille avec Top Cow. Je peux juste vous dire que c’est un projet dont je rêvais depuis mes débuts. Cette proposition était inattendue car j’ai grandi en tant qu’artiste en regardant et en étudiant les comics de Top Cow et d’Aspen : FathomWitchbladeDarknessMarc Silvestri était et reste une inspiration. Même si c’est un réel challenge, je me sens chez moi.

Vous êtes également chanteur et musicien.

Pendant dix ans, j’étais dans un groupe de black métal symphonique avec de très anciens amis. On a fait de nombreux concerts et même un album et deux LP qui sont encore sur Spotify, mais ce n’était qu’un passe-temps. En revanche, l’an dernier, j’ai publié un art book très personnel sur des artistes ayant influencé ma vie. Avant de dessiner mes planches, je m’échauffai par des croquis de musiciens. J’ai décidé de rassembler ces œuvres dans un art book, d’y ajouter une playlist de titres que j’ai choisis et même de soigner l’emballage. J’ai envoyé un exemplaire à certains musiciens ce qui m’a permis d’échanger avec eux dont Cristina Scabbia la chanteuse de Lacuna Coil.

Pour terminer, je tiens à remercier Diable Blanc Comics dont la collaboration a rendu cet échange possible.

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