[Interview] Eleonora Carlini, l’effort et le fun

Nous arrivons à la quatrième interview réalisée lors du Paris Manga par la dessinatrice italienne Eleonora Carlini que j’ai découvert en préparant l’interview. Je me suis ensuite précipité pour lire ses épisodes tant son propos était humble et motivant.

La lecture de bd occupait-elle une place importante dans votre enfance ?

À l’âge de onze ans, les mangas m’ont donné le goût de la bd puis j’ai élargi mes lectures avec différents types de mangas et de bd. Jusqu’à ce jour, mon intérêt n’a cessé de grandir avec des hauts et des bas. J’ai fait beaucoup de choses dans ma vie, mais j’ai toujours su que je serais artiste sans savoir dans quel domaine et comment y arriver. Je suis de nature curieuse et, quand quelque chose attise ma curiosité, j’y vais à fond. J’ai essayé la mode, la peinture, la sculpture, les arts manuels… Finalement, quand j’étais au lycée, j’ai retrouvé la passion des comics. 

Vous avez choisi d’aller dans une école italienne de bd.

En réalité, j’ai commencé dans une école supérieure de Beaux-Arts puis j’ai suivi la section illustration d’une école de bd mais cela ne m’a pas plu et je suis donc retourné aux comics. Étant également professeur, je dis toujours à mes étudiants de ne pas se spécialiser mais de garder ouvert toutes les voies. En tant que free-lance, si on se ferme des portes, les clients ne viendront pas nous chercher. Une fois acquis une vision globale de l’art, ils pourront faire ce qu’ils veulent : l’illustration, le game design, la bd… 

Comment avez-vous eu accès au marché américain ?

J’ai envoyé par mail un court portefolio à de petits éditeurs, mais sans y croire. Zenescope m’a pourtant proposé de réaliser des histoires de six pages puis un épisode entier. Lors de mon premier travail, j’ai beaucoup pleuré car j’étais inquiète de me tromper et donc de gâcher mon avenir. Cependant, je m’en suis sorti. J’ai ensuite dessiné la série Doctor Who pour Titan Comics pendant un an et demi. Ce travail m’a fait repérer par Boom Studios!, IDW, Rainbow, Vilain Comics et DC Comics. Je suis passé sur Green Arrow pour trois épisodes autour de Roy Harper puis Wonder WomanBatgirl… 

Après DC Comics et Boom, je suis arrivé chez Marvel sur Woman of MarvelSpider-Man et Black CatMarauders est ma plus longue série. J’étais stressée car les X-Men ont beaucoup de fans et mon style n’est pas habituel dans les comics mais une grande partie des lecteurs apprécient. J’avais rencontré le scénariste Steve Orlando à la New York Comic Con puis on a souvent échangé par WhatsApp ou par mail. C’est une belle personne et un bon écrivain. Marauders est ma première série régulière. Quand on débute, tenir les délais est stressant mais il faut garder confiance. Chaque artiste est différent et trouve sa propre manière de raconter une histoire. Plus jeune, je faisais le tour des conventions où je demandais à des professionnels de regarder mon portefolio et de me conseiller. C’est une étape importante pour comprendre les différentes approches et profiter des expériences de chacun. La seule constante est le travail régulier et les opportunités bien entendu. Il est important de se concentrer sur le travail au jour le jour et de contrôler de nombreuses éléments du storytelling. Comme un réalisateur, il faut penser à la scène, au cadrage, aux sentiments, à la posture des personnes… Au bout d’un certain nombre d’épisodes, j’ai trouvé une approche naturelle. Mon passage sur Marauders est fini. Je ne sais pas précisément quels projets vont venir mais peu importe tant que je m’amuse à dessiner. J’ai une piste pour un éditeur américain de taille moyenne mais je ne peux encore l’annoncer.

En parallèle vous révélez sur Instagram une histoire écrite par vous : Face the Fear.

Dans ma carrière, il y a une partie très personnelle et une partie plus mainstream. Je souhaite également devenir une autrice complète. 

Vous semblez êtres une autrices engagé en participant à l’ANTIFA!nzine

Quand j’étais jeune, j’ai fait partie d’un mouvement étudiant à l’école et l’antifascisme est resté en moi car je crois au collectif et à la bienveillance.

On vous trouve sur plusieurs séries avec des héroïnes. Est-ce un choix facile des éditeurs ?

Dans l’industrie des comics, je n’ai jamais eu la sensation d’avoir été sélectionnée en tant que femme, mais comme une artiste. Je me considère comme une artiste et peu importe que tu sois un homme ou une femme tant qu’on est une professionnelle fiable.

Je ne peux conclure qu’en remerciant Paris Manga et Diable Blanc Comics d’voir permis cette rencontre.

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