[review] Joker 80 ans : de trop ?

Afin de préparer un Bat-reviews, le podcast de Batman Legend où nous scrutons les sorties Urban liées à Batman du mois passé, j’avais relu Joker 80 ans, ou plus précisément les deux albums anglophones compilés par UrbanThe Joker: 80 Years of the Clown Prince of Crime HC (une anthologie des histoires du Joker depuis sa création) et The Joker 80th Anniversary 100-Page Super Spectacular #1 (une dizaine d’histoires originales, réalisées pour célébrer les 80 du clown) – mieux vaut préciser au cas où vous constateriez des différences entre ce que je vous dit et votre volume.

On en dit quoi sur Comics have the Power ?

La partie anthologique est très bien faite, et s’arrête à « Death of the Family » en passant par Gotham Central, « Silence », du Englehart/Rogers, la fin de Death in the Family (avec cette fascination curieuse de Bruce pour le Joker ambassadeur de Khomeini), l’intégralité (!) de Mad Love, le début de Killing Joke… J’y ai même découvert une très chouette histoire de Noël où Paul Dini et Don Kramer content l’enlèvement de Robin. 

Bien sûr on peut toujours déplorer telle ou telle lacune (pas l’incontournable « Case Study » de Black & White, pas d’Empereur Joker, pas d’Azzarello/Bermejo), mais dans la limite d’un album, la sélection est impeccable, des origines jusqu’à Snyder, et parsemée de textes particulièrement intéressants de Paul Dini, Jeph Loeb, Mark Hamill… quand on attendrait au mieux des banalités corporate.

On déplorera tout de même qu’Urban n’indique sur la fiche de l’album que le titre des deux œuvres de DCComics compilées, sans lister les récits inclus… alors que les doublons avec Joker Anthologie sont bien sûr nombreux, et mériteraient pratiquement d’être cités spécifiquement ! Manœuvre marketing ou manque de temps, c’est dommage, et c’est le genre de « détails » par lequel on se gagne la sympathie d’un lectorat.

La partie inédite est en revanche… d’une médiocrité assez confondante

James Tynion IV et Mikel Janin se contentent de donner un background à Punchline, alors que ce n’était pas particulièrement le lieu, et que tout aurait mieux valu que d’en faire aussi platement une ado gothique fan du Joker ; Azzarello et Bermejo, avec quelques trouvailles graphiques, se contentent de réécrire Vol au-dessus d’un nid de coucou, comme s’ils avaient revu le film pour préparer le visionnage de Ratched et s’étaient dit que ce serait drôlement intello comme pastiche – et plus économique que d’inventer une histoire – même si cela n’aura juste aucun sens pour qui n’a pas aussi revu récemment le Forman ; d’autres ont une vague idée initiale mais absolument aucune notion de chute, y compris Dennis O’Neil (et qu’il est triste de penser qu’il signait peut-être là son tout dernier comics) et Paul Dini ; je confesse n’avoir juste rien compris à la démarche d’autres (l’espèce de comptine de Tomasi ?)…

Deux récits surnagent cependant, le « Scars » de Scott Snyder et Jock, une nouvelle horrifique féroce qui inaugure trop bien le fascicule, et cette histoire de fête d’anniversaire d’un petit garçon, organisée par le Joker, et composée par… Tom Taylor (avec les pinceaux d’Eduardo Risso), dont il est confondant de constater avec quelle régularité il parvient à traiter ses personnages avec justesse, quel que soit celui qu’on lui confie.

On croirait que les dirigeants de DC se sont levés un matin en s’apercevant qu’on célébrait ces jours-ci les 80 ans du Joker et qu’il serait opportun de faire quelque chose, cherchant vite les équipes artistiques capables de produire n’importe quoi en quelques jours… Le but d’une anthologie anniversaire d’histoires inédites est manifestement de prouver que malgré le poids de l’âge, un personnage a conservé sa vitalité, sait toujours aussi bien inspirer les auteurs et marquer son temps. Ces 100 pages sont la meilleure preuve du contraire, jusque dans les « pinups », galerie d’illustrations par les « plus grands » (Reis, Staples, Romita Jr., Wagner, Sale, Sejic, Jones… excusez du peu), dans l’ensemble plus passables qu’exceptionnelles.

Reste que, si vous ne possédez pas Joker Anthologie et appréciez pourtant le personnage, vous avez affaire avec Joker 80 ans à 550 pages pour 35 euros, plus de 400 pages étant allouées à une excellente sélection des meilleures histoires depuis Batman #1 (1940) à « Death in the Family » (2013), de quoi tout de même considérer sérieusement l’achat !

Siegfried « Moyocoyani » Würtz

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