[review] Ultimate Spider-Man Miles Morales

Trouvé dans une boutique d’occasion, ce beau livre criait afin que je le sauve de la poussière de son rayon. Comme chacun a le devoir d’aider les comics en détresse, je n’ai pu résister. De plus, je cherchais à trouver une bonne série écrite par Brian Michael Bendis, je me donc suis jeté sur l’Omnibus d’Ultimate Spider-Man.

Un résumé pour la route

Ultimate est un univers parallèle à celui des séries historiques Marvel. Au départ, il avait été créé pour permettre à des scénaristes stars de se débarrasser de la continuité et donc d’être bien plus libres. J’apprécie plutôt les débuts de l’univers Ultimate car tout est très connecté et autour d’une poignée de séries seulement (Ultimates au centre) et de lieux (S.H.I.E.L.D., Roxxon, Oscorp…). Créer cet univers clos facilite l’adhésion comme le faisait Claremont avec les X-Men. Cet univers s’est cependant essoufflé et il a disparu en 2015 après le crossover Secret Wars. Comme Peter Parker, Miles Morales, un afro-américain de 13 ans, a été piqué par une araignée génétiquement modifiée. Il se retrouve avec des super pouvoirs. Que doit-il faire quand Peter Parker meurt dans un combat ?

L’omnibus rassemble les 28 premiers épisodes de la série Ultimate Comics : Spider-Man et le numéro 200 d’Ultimate Spider-Man dans un beau volume de 672 pages. L’ensemble est scénarisé par Brian Michael Bendis, le poids lourds de Marvel depuis plusieurs années. A l’image de nombreux fans de longue date Marvel, je suis assez circonspect sur l’aura de ce scénariste. J’ai détesté ses derniers travaux (Uncanny X-Men) mais j’avais adoré le début des New Avengers. L’énorme partie des épisodes a été dessinée par Sara Pichelli. Je ne connaissais par cette artiste italienne avant de lire ce volume. Elle a essentiellement dessiné Ultimate spider-Man et continue à le faire.

On en dit quoi sur Comics have the power ?

Cette série opère un véritable retour aux bases du Tisseur. Les combats ne sont pas forcément au centre de chaque épisode. On lit surtout la vie quotidienne d’un adolescent : sa vie de famille de la classe moyenne, son meilleur ami, son installation dans un nouvel internat… De plus, l’ensemble du volume est facile à suivre si on n’a pas lu tout l’univers Ultimate même les crossover.

Le scénario réussit très bien à actualiser ce schéma ancien. Les personnages discutent par sms. Spider-man est inclus très vite dans le monde des héros, ce qui est plus réaliste avec les nouvelles technologies de surveillance et la multiplication des héros dans l’univers Ultimate. Miles Morales n’est pas un scientifique de génie, un photographe de presse ou même un étudiant brillant. C’est un adolescent de 13 ans qui se retrouve par hasard doté de pouvoirs hors du commun. Le volume début en effet par une phase euphorique de découverte des pouvoirs. Ces pouvoirs sont différents de son prédécesseur Peter Parker mais, comme Spider-man ils sont assez simples – s’agripper au mur, super-force et venin. L’adolescent s’amuse de ces dons mais refuse les responsabilités avant de les accepter. Il prend la suite de Peter mais il n’est pas Peter. Miles est plus jeune que Parker – même au début de la saga dans les années 1960 – et il a donc d’autres soucis. Au début, Miles n’a pas de flirt car, très jeune, ce n’est pas ce qui l’intéresse. Être Spider-Man l’empêche aussi d’avoir une vie personnelle. Il n’est pas orphelin et le récit se centre sur les problèmes relationnels d’un adolescent avec son père. Bien qu’assez classique, je trouve cela très bien raconté et attachant pour Miles et pour son père. Pendant les combats, il y a bien moins de blagues mais beaucoup d’insertion de réflexion où Miles se demande comment faire pour gagner ou comment Peter aurait fait. C’est une vraie réussite de l’histoire car le lecteur est plongé dans le cerveau de Miles tout en voyant l’action se dérouler. Cela me semble plus réaliste que le fun de Peter.

Bendis crée un environnement intéressant autour de Miles. En effet, les personnages secondaires sont passionnants. Son meilleur ami fan de Lego, Ganke est une vraie réussite. Il n’est pas un simple spectateur de la double vie de son ami mais cherche à l’aider comme il peut même s’il n’a aucun talent particulier. C’est une technique parfaite pour que le lecteur s’identifie à cet ami plutôt qu’à Miles, qui est exceptionnel. Le cinéma ne s’y est pas trompé en reprenant – mal – ce personnage dans le dernier film. L’oncle qui ressemble physiquement beaucoup à Snoop Dog est également une très bonne idée. Ce mauvais génie pousse Miles à réfléchir à ses limites et à sa relation avec son père. Jonah Jameson est plus humain. Après la mort de Parker, le sentiment de perte est bien traité pour Gwen Stacy. Bendis arrive à créer un groupe contrairement à ses séries récentes sur les X-Men. En début de volume, les personnages secondaires sont souvent plus intéressants que le nouveau Spider-Man.

Plus globalement, c’est un récit très concret que nous livre Bendis. Comment faire le mur à l’internat ? Faut-il dévoiler son identité secrète à sa famille ? Où trouver du fluide ? A nouveau, c’est une vraie bonne idée pour les aventures d’un nouveau super-héros. Spider-Man m’a toujours semblé plus intéressant quand il est plongé dans ses difficultés concrètes et au milieu de la jungle urbaine de New York. Dès qu’il s’éloigne du quotidien, les aventures du tisseur me plaisent moins. Bendis sait faire de Miles un super-héros du quotidien. J’ai donc beaucoup apprécié les péripéties de Miles et bien moins les parties avec Ultimates. En fin de volume, la période de deuil n’est pas expédiée en un épisode mais elle est longue et complexe. Cela permet aussi de faire vieillir le héros qui rattrape l’âge des histoires de Ditko et a changé de vie en un an. Le récit se relance très bien après le deuil. Il y a enfin un aspect un peu sombre qui annule l’aspect trop lisse de Miles.

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Le récit réussit à montrer le problème de succéder à un héros et la difficulté de se confronter à un modèle imposant. Miles Morales est afro-américain mais, dans le scénario de Bendis, la couleur de peau n’a rien de particulier. Sur l’ensemble de cet épais volume, il n’est sur aucune case confronté au racisme et ne se questionne jamais sur le fait de succéder à un blanc, comme si c’est normal. On est très loin du choix de Remender sur All-new Captain America. Bendis choisit volontairement d’exclure tout aspect politique du récit car il ne parle pas non plus des inégalités sociales. La famille de Miles vient de la classe moyenne intégrée. Veut-il montrer que les minorités peuvent être intégrées au rêve américain ou est-ce un déni d’une société américaine encore marquée par la race ? Sa couleur n’est pas anecdotique selon moi car, au cinéma, Ultimate Spider-Man reste blanc alors que le scénario reprend des idées venues du récit de Bendis (les origines du costume, Ganke). C’est une relecture réaliste mais aussi plus aseptisée qui a un peu trop gommé les aspects politiques ou sombres de Spider-Man.

De la même manière, contrairement à Peter Parker qui était le geek exclu du lycée, Miles Morales n’est absolument pas rejeté. Il a un ami puis, bien plus loin, une petite amie mais c’est tout. Il ne semble pas intégré dans ce lycée d’élite mais rien n’indique qu’il est moqué. Ce choix me paraît extrêmement étrange. Pourquoi centrer sur la vie de Miles par rapport à Spider-man dans sa famille et son ami mais, en même temps, ne jamais parler de sa vie au lycée ? Cela se résume à des discussions amicales sur son nouveau métier de héros et sa famille. Cela me paraît pour le moins incomplet. Les geeks ne sont plus des exclus et ne subissent aucune moquerie ? Un noir et son ami asiatique dans un collège d’élite n’ont jamais aucune remarque ? J’en doute fortement.

Un indéniable atout de cette série, ce sont les dessins. Sara Pichelli réalise un superbe travail. Cette artiste que je ne connaissais pas avant a un style très photographique mais qui n’est jamais figé. Les combats se suivent facilement sans heurt et, dans les cases plus émotives, elle a un rendu très précis des émotions. Le découpage est assez simple avec des grilles, souvent sur une double page. On retrouve la même organisation au fil des épisodes. Il y a peu de sortie de case mais cela ne donne pas un récit figé. Ce style mais surtout l’encrage et encore plus les couleurs créent un rendu très photographique. Cela contribue au réalisme et à l’attachement que l’on peut éprouver pour ces personnages de papier qui paraissent ainsi très réels.

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Pour finir, j’ai pu apprécier mon premier Omnibus. C’est une édition de prestige avec un très beau papier, une traduction de qualité et une reliure solide pour de nombreuses lectures. On retrouve l’ensemble des couvertures de l’édition américaine mais on peut regretter qu’il n’y ait aucun bonus.

Alors, convaincus ?

L’ensemble des récits sont très bien faits et on ne s’ennuie jamais. De nombreux personnages sont très attachants. Les dessins sont une vraie réussite car ils rendent le récit encore plus réaliste. Le fait qu’une même dessinatrice reste aussi longtemps sur la série est aussi fantastique. En résumé, ce volume est une parfaite porte d’entrée dans le monde des comics pour un néophyte. Cependant, je ne suis pas totalement embarqué. Bendis fait œuvre d’un bon artisan mais il lui manque un grain de folie ou de génie. Peut-être ai-je aussi trop lu pour être pleinement convaincu ?

Thomas S.

8 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. Je n’ai jamais lu de Miles Morales mais j’aimerai bien. Bon avant j’aimerais finir le Ultimates avec Peter.

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  2. Thomassavidan dit :

    Je te le conseille. C’est vraiment pas mal. les dessins sont très bons et cela se lit agréablement.
    Thomas S.

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