[review] Batman et les tortues ninja

Il existe de très nombreux crossover improbables dans l’univers des comics et on y côtoie le pire comme le meilleur. Rien d’étonnant donc à voir une chauve-souris s’allier à quatre tortues pour former une équipe des plus improbables.

Le mélange peut paraître assez surprenant pour celles et ceux qui, comme moi, ont été nourris aux séries animées des années 1990 : Batman animated d’un côté avec son univers sombre où l’humour n’est pas forcément à l’honneur et les Tortues Ninja de l’autre qui dépeint un univers coloré, virevoltant et plutôt drôle. Comment concilier ces deux styles dans un même ouvrage avec réussite ?

Un résumé pour la route

batmantortuesninja_1Batman et les Tortues Ninja est scénarisé par James Tynion IV et dessiné par Freddie E. Williams II. Les couleurs sont dues au pinceau de Jeremy Colwell. La série sort chez DC et IDW aux Etats-Unis en 2015. En France, le titre sort en 2017 chez Urban Comics dans la collection Urban Kids.

La ville de Gotham fait l’objet d’une vague de cambriolages qui vise de grands sites industriels. Les responsables sont un clan de Ninjas que l’on appelle le clan des Foot, jusqu’alors inconnu dans cette bonne ville de Gotham. Les témoignages recueillis font état de la présence d’êtres très étranges : des humanoïdes mutants aux allures de Tortues Ninja. Batman, très intrigué, décide de mener l’enquête. Rien de tel qu’une bonne baston pour oublier l’anniversaire de la mort des parents de Bruce Wayne. Une alliance improbable va alors se nouer entre un homme chauve-souris et un quatuor de tortues mutantes.

On en dit quoi sur Comics have the Power ?

Avant de commencer, je me dois de dire que je ne suis pas ultra fan des crossover entre licences, j’ai toujours un peu peur que le mélange ne prenne pas, j’ouvre donc toujours ce type d’ouvrage avec un peu d’appréhension. Je me suis tout de même laissé tenter par celui-ci à cause de son prix de 10 € qui permet de tester un titre sans trop se ruiner. En outre, l’alliance entre ces deux univers mythiques a de quoi intriguer malgré tout.

Le rythme du récit est assez enlevé et ne laisse pas le lecteur respirer : on démarre sur les chapeaux de roue alors que le clan Foot de Shredder a déjà envahi Gotham et pille la ville sans vergogne. Il est poursuivi par les Tortues ninja et leur maître Splinter qui déboulent à leur tour et bouleversent une cité pourtant habituée aux turpitudes. Pour expliquer l’incursion des Tortues et de leur pire ennemi au milieu du Batunivers, rien de plus simple : un bon vieux portail dimensionnel fera l’affaire. On ne vise pas forcément l’originalité ici, mais il est finalement guère possible de faire autrement.

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L’intérêt du crossover réside dans l’interaction entre deux univers qui n’ont pas grand chose à voir l’un avec l’autre. Il faut reconnaître que l’alliance entre Batman et les Tortues fonctionne plutôt bien : après une baston entre eux, les héros forment un groupe uni prêt à bouter Shredder et sa troupe hors de Gotham. Sur le plan des combats, le lecteur est servi puisqu’outre Shredder, une bonne vieille galerie d’adversaires de Batman se mêle à la bagarre, qu’il s’agisse du perfide Ras’Al Ghul, du fourbe Pingouin ou du Joker plus malade que jamais. Les planches de Freddie E. Williams soutiennent le récit avec force, offrant des double-pages foisonnantes et dynamiques. On est loin du style cartoony que certains pourraient attendre quand on évoque les Tortues Ninja. Les mangeurs de pizza sont ici musculeux et évoluent dans un univers très sombre qui sied parfaitement à Batman. Bon, il y a quelques bizarreries comme une batmobile des plus étranges et pas des plus réussies…alors que Batman arbore à un moment une armure étonnante mais dans l’ensemble Gotham est aussi sordide que d’habitude et l’asile d’Arkham flanque bien les jetons !

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L’interaction entre les héros est également plutôt bien rendue : les quatre tortues ont des caractères bien différents qui sont restitués avec justesse pour certaines d’entre elles. Michelangelo est un grand gamin toujours prêt à jouer et à tourner la vie en dérision. Il surfe sur les rampes du manoir Wayne au grand dam d’Alfred et chevauche le dinosaure de la Batcave. Raphaël est exploité avec beaucoup d’intelligence : méfiant, râleur, il cache une grande sensibilité que Batman sait toucher. Il faut dire qu’il a un peu le même problème à gérer avec son propre fils Damian qui apparaît également dans cette aventure. Le récit est centré sur les héros et même si les vilains ont une place importante, on sent bien qu’ils sont le prétexte à la réunion de Batman et des Tortues mais peu importe finalement car la fusion des deux univers fonctionne parfaitement et si l’on sait que les Tortues finiront fatalement par quitter Gotham, leur incursion dans la ville du chevalier noir ne paraît pas incongrue et permet de bons moments d’humour sans exagération et de complicité non feinte.

Alors, convaincus ?

Batman et les Tortues ninja use de toutes les bonnes ficelles du crossover, mêlant sans faute de goût l’univers de Batman et celui des Tortues ninja dans un affrontement attendu opposant les héros à une alliance de vilains des deux mondes. Graphiquement, on a entre les mains un titre dynamique et plutôt réussi qui met en valeur aussi bien les chevaliers d’écaille que le chevalier noir.

Sur le plan du scénario, James Tynion IV alterne l’humour bien senti et l’émotion car il sait tirer le meilleur parti des personnages dont il organise la rencontre improbable. Batman et les tortues ninja remplit parfaitement son contrat. On se demande juste pourquoi Urban l’a placé dans la collection Urban Kids car le titre est plutôt sombre et intéressera peut-être davantage les adultes mais c’est un détail. L’édition est soignée et les couvertures variantes présentées en fin de volume sont de vraies réussites. On y trouve des artistes de premier plan comme Gabriele Dell’Otto, Michael Allred, Ivan Reis, Neal Adams et bien d’autres. De quoi terminer cette lecture en beauté !

2 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. wildstorm dit :

    Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai toujours été allergique aux tortues ninja (alors que j’aime tout ce qui touche de près ou de loin les ninja). Je ne sais rien d’eux et je n’ai rien vu d’eux non plus. Que je rate quelque chose ne m’étonnerait pas. Et du coup, impasse également sur cette histoire… Une seule chose me ferait changer d’avis, John Byrne.. :p

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  2. pistoletabulles dit :

    Les tortues m’ont toujours fait ni chaud ni froid… Question de génération, d’âge, peut-être. Même si je connais leurs origines et le côté underground et parodique du quatuor, je n’ai jamais vraiment adhéré aux histoires un peu trop wtf des mangeurs de Pizza. Mais j’avoue que ta critique me donne envie de jetter un oeil à ce crossover improbable. Les dessins ont l’air vraiment bien et le mélange des univers ne semblent pas trop choquant. Mais j’ai peur que cela soit un peu trop fan service. Et comme je ne suis pas trop fan des tortues… Bref, je reste circonspect. Intrigué certes mais méfiant 🙂

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